Claude-Nicolas Ledoux est l’architecte de la Saline Royale d’Arc-et-Senans. C’est aussi un des architectes et urbanistes les plus productifs de son temps.
Claude-Nicolas Ledoux est né en 1936 à Dormans, en Champagne. Fils de marchands modestes, il apprend le dessin avec sa mère et sa marraine. Remarqué pour son intelligence, il obtient une bourse pour poursuivre ses études à Paris, au collège de Beauvais. Il y découvre les littératures anciennes et les sciences, et noue de précieuses amitiés pour sa carrière. A sa sortie, il devient graveur pour gagner sa vie et prend en parallèle des cours d’architecture avec Jacques‑François Blondel.
En 1762, le jeune Ledoux reçoit sa première commande : il crée les décors du café Godeau, aujourd'hui conservé au musée Carnavalet à Paris. Ce premier succès lui permet de continuer dans cette voie. Nommé architecte-ingénieur des Eaux et Forêts en 1764, il travaille essentiellement à des ouvrages fonctionnels : ponts, fontaines, puits, écoles ainsi qu'à des églises. C'est le cas du pont de Marac et du pont Pré‑Gibert à Rolampont, ou encore de l'église de Cruzy-le-Châtel et du choeur de Saint-Etienne d'Auxerre. Cette carrière dans le génie civil lui procure une expérience technique qui lui sera très utile quelques années plus tard pour la conception de la Saline Royale.
- Maquette de l'hôtel Thélusson - A voir au musée Ledoux, à la Saline Royale d'Arc-et-Senans |
Parallèlement, Ledoux bâtit pour des clients privés fortunés : aristocrates, financiers, artistes... Il obtient des commandes prestigieuses de châteaux, pavillons et hôtels particuliers. Il réalise ainsi le château de Mauperthuis pour le marquis de Montesquiou, le château de Bénouville pour le marquis de Livry, la chaussée d'Antin pour la présidente Hocquart, ou encore les hôtels particuliers Guimard, d'Hallwyl, d'Uzès, de Montmorency... Sa réputation croît continuellement : il devient l'architecte en vue, celui à qui il faut faire appel pour être bien vu.
Dans les années 1770, Ledoux atteint son apogée : il finit par travailler pour le pouvoir royal. C'est en 1771 qu'il commence véritablement à traiter avec la royauté : il édifie un pavillon dans les jardins de Louveciennes pour Madame du Barry, la nouvelle favorite de Louis XV. Grâce à sa protection, il est nommé commissaire des salines pour la Franche-Comté, la Lorraine et les Trois-Evêchés puis promu inspecteur des salines de l'Etat en Franche-comté. Deux ans plus tard, il entre à l'Académie royale d'architecture et devient architecte de la Ferme générale (institution financière chargée de percevoir les impôts).
C'est alors qu'il réalise la Saline Royale d'Arc-et-Senans, sa plus grande entreprise. Fort de son statut, il poursuit sa carrière en honorant des commandes publiques. Il met ainsi sur pied le théâtre de Besançon, la prison et le palais de justice d'Aix-en-Provence et un grenier à sel à Compiègne.
A voir : Le théâtre de Besançon
Le théâtre de Besançon est une des oeuvres de l'architecte Claude-Nicolas Ledoux. Il en reçoit la commande alors qu'il travaille à la construction de la Saline Royale à Arc-et-Senans, à quelques dizaines de kilomètres de là. Ledoux a alors le souci de donner un lien régional et architectural aux deux ouvrages : il les dote d'un trait similaire, fortement inspiré des théâtres de l'Antiquité. D'un point de vue technique, le théâtre de Besançon est un ouvrage véritablement novateur. Il offre des conditions acoustiques, visuelles et de confort inégalées pour l'époque. Ledoux y met en place deux installations nouvelles : il garnit le parterre de fauteuils, offrant au public populaire des places assises, ce qui n'était pas d'usage jusque là. Par ailleurs, il dissimule les musiciens dans une fosse d'orchestre, un concept tout à fait nouveau. Inauguré en 1784, le théâtre reçut des éloges. Aujourd'hui encore, le théâtre de Besançon est une salle de spectacles. Il adopte cependant des installations nouvelles. Victime d'un violent incendie en 1958, la salle dut en effet être reconstruite. |
A partir de 1785, Ledoux s'emploie à la construction du mur des fermiers généraux à Paris, une enceinte douanière servant à percevoir l'impôt sur les marchandises entrantes dans la ville. Le projet de l'architecte prévoit une soixantaine de pavillons d'octroi (sorte de postes de contrôle). Tous différents et tous monumentaux, ils arborent un style antique, inspiré des propylées grecs.
Ce mur des fermiers généraux est très mal perçue par les Parisiens, autant pour sa fonction que pour son esthétique jugée outrancière. Symbole de la tyrannie fiscale, du gaspillage et de l'absolutisme royal, elle fait l'objet d'attaques destructrices à partir de juillet 1789.
A voir : Quatre pavillons sont encore debout aujourd'hui : les rotondes du parc Monceau et de la Villette et les pavillons de la place Denfert-Rochereau et de la place de la Nation.
Le projet du mur des fermiers généraux aura raison de la carrière de Claude-Nicolas Ledoux. Face à l'hostilité suscitée par l'ouvrage, il est suspendu puis révoqué définitivement en 1789. Quatre ans plus tard, il est emprisonné par les révolutionnaires pour qui il incarne la noblesse et la royauté. Il retrouve sa liberté en 1795 mais est alors complètement tombé en disgrâce. Devenu l'architecte maudit, il se consacre alors à l'écriture de son traité d'architecture : L'architecture considérée sous le rapport de l'art, des mœurs et de la législation. Un seul volume, sur les cinq ambitionnés, sera publié, en 1804. Ledoux meurt deux ans plus tard, en 1806, à l'âge de 70 ans.